La femme libertine, cet animal de compagnie

Netech’, c’est le festival de la fesse. Allez-y avec modération, et pas pendant les heures de repas. En guise d’images de bienvenue: femmes à quatre patte exhibant leur anus, bites en gros plan, pénétrations sauvages et autres clichés pornographiques en veux-tu en voilà. Grâce aux nouvelles technologies, on peut apprécier chaque détail des organes génitaux des libertins: c’est la gynécologie à portée du clic.

Il ne faudrait pas croire pour autant à la libération sexuelle. Le visionneur naïf pourrait s’imaginer que les tabous n’existent plus, qu’on peut enfin s’envoyer en l’air comme on veut, quand on veut, et avec qui veut. Erreur… Ce serait un peu comme constater la profusion de publicités dans les rues et en déduire que personne ne meure de faim et que tout le monde a ce qu’il lui faut ! Tout cet étalage de viande n’est là que pour appâter le client, et le bon, celui qui a de quoi payer… Ou plutôt, échanger.

L’échangisme, c’est glauque. C’est pour ça qu’on l’enjolive de tout un folklore chic et glamour, qui ne peut d’ailleurs berner que ceux qui ont vraiment envie d’y croire.

L’échangisme, c’est quoi? Un couple dont chaque partenaire échange le sien avec un autre? C’est ce que prétendent les libertins. L’échangisme, ce sont des hommes qui échangent leurs femmes, avec la complicité ou la résignation de ces dernières. Parfois un mélange des deux. Bien sur, elles ne l’admettront presque jamais.

Le milieu libertin est un milieu dominé par les hommes. Je dirais même que c’est un milieu particulièrement patriarcal, même par rapport à la société dans laquelle nous vivons. Il s’agit d’obtenir des femmes, le plus possible. Exhiber la sienne n’est qu’un moyen pour cette fin. Regardez comme ma femme est bonne, montrez-moi donc les vôtres !

Evidemment, aujourd’hui en 2012, tout ceci ne pourrait pas exister sans la complicité des femmes. Et comment obtenir cette complicité en annonçant clairement la couleur? Impossible. Il faut bien montrer qu’on respecte les femmes, qu’on les aime, qu’on les adore, que ce sont des princesses. On les aime le plus féminines possibles, et on le dit haut et fort. Le libertinage est un haut lieu de la Galanterie. J’ai souvent entendu ces petites phrases de la part des libertins: « ce que femme veut, Dieu le veut ». « L’homme propose, la femme dispose ». Ou encore, le sacro-saint « rien n’est obligatoire », en permanence adressé aux femmes. C’est de la poudre aux yeux: un échangiste qui se ramène en soirée avec sa femme, si celle-ci n’a aucun rapport sexuel… Une fois, ça va. Deux ou trois fois, on la taxera de pudibonde, de fausse libertine… Ce genre de choses n’est pas rare, car il n’est pas facile pour les hommes de trouver une femme prête à servir de monnaie d’échange, et certaines femmes accepteront de se rendre en soirée, mais pas d’avoir des rapports sexuels. Parfois également, il y a simplement la jalousie du monsieur, qui veut bien coucher avec beaucoup de femmes, mais préfère garder la sienne.

Mais les femmes restent, en apparence, les grandes princesses du milieu libertin. Elles choisissent. Elles se disent d’ailleurs extrêmement sélectives, très exigeantes, et tout le toutim. Je suis pourtant surprise de voir à quel point les femmes en couple se font mener à la baguette sans même s’en rendre compte. La plupart des couples rejettent les hommes seuls et cherchent activement « une femme seule (soi-disant) pour Madame », alors que les femmes seules se disent presque toujours exclusivement hétérosexuelles… Une fois en couple, les femmes arrivent à se convaincre qu’elles sont bisexuelles, mais elles ne voient jamais l’intérêt de rencontrer une autre femme en l’absence de leur Homme. Courage bonhomme, un jour tu l’auras ton plan à trois.

Sur les fiches de couples, la femme est souvent décrite avec un champ lexical qui pourrait convenir à un chien ou un cheval: « douce », « docile »… Elle a aussi droit à la mention de ses mensurations complètes (ou au moins la poitrine), ainsi qu’à « élégante » et « sensuelle », tandis que l’homme sera souvent décrit comme « dominant » ou « directif », parfois « endurant », ou autres biteries.

Les soirées libertines sont généralement organisées par des hommes, célibataires ou en couple. Ils envoient des invitations au plus de personnes possible, car ces petites soirées sont généralement très lucratives. Récemment sur netech, j’ai reçu une de ces invitations pour une « petite soirée privée » (comprenez: une partouze avec du champâgne). L’annonce précise bien: « J’accorde une attention particulière au casting des hommes seuls qui seront co-organisateurs et animateurs de la soirée. » (les autres amènent une gonzesse, on peut pas tout leur demander). Et bien sur, ce sont ces dames qui se chargent de la bouffe: « Les couples et hommes seuls emmèneront une bouteille de champagne et les femmes seules du sucré ou salé. » A la cuisine, femme !

Il ne faut pas croire que les femmes libertines sont plus autorisées que dans d’autres milieux à avoir une sexualité libre et active. Une femme cherchant des hommes juste pour s’envoyer en l’air sera généralement perçue comme une salope que n’importe qui peut utiliser comme bon lui semble. Beaucoup de femmes se protègent de cette image en se mettant en couple, et celles qui sont malgré tout célibataires (généralement pas très longtemps) insistent lourdement sur leur non-disponibilité à toutes les bites qui passent. Lisez leurs fiches: « je suis exigeante », « je ne couche pas avec n’importe qui… » Ou, parfois, comme pour s’excuser d’avance: « je ne suis là que par curiosité », « juste pour voir »…

Au final, ces précautions valent bien peu. Toute libertine se retrouve, un jour ou l’autre, plus ou moins obligée d’avoir un rapport sexuel. Bien sur, la force ne serait jamais utilisée, mais les conventions sociales du milieu libertin, la politesse et la bienséances peuvent l’exiger.